Notre remise des prix saison 2022-2023
s'est effectuée sur le site du musée RUDEL
en date du samedi 24 juin 2023
Nous remercions la municipalité de Palavas-les-Flots, partenaire du concours,
représentée par
Monsieur Jean-Marie GUIRAUD-CALADOU, adjoint au maire, délégué à la culture.
Nous remercions Jocelyne KNOCKAERT, correspondante Midi-Libre.
Nous remercions également l'équipe organisatrice.
Vous avez été nombreux à participer à notre concours et nous vous en remercions.
Les œuvres réceptionnées nous parviennent de tout l’hexagone,
les départements 17, 30, 34, 35, 56, 57, 67, 75, 81, 83, 93.
Le choix des membres du jury fut encore plus difficile que les années précédentes
en raison de la qualité et du nombre croissant des œuvres réceptionnées.
De nombreuses heures de lecture pour nos membres du jury.
Michel THERON (président du jury)
Pierrette DROUARD
Nous les remercions pour le travail remarquable qu'ils accomplissent.
Poésies
1e prix : Un jour peut-être.
Le thème étant l’Amour, l’Amitié, on ne s’attendait pas à trouver un texte sur la fin de l’amour. Pourtant la fin d’une relation est aussi importante que la relation elle-même : toutes deux, à égal niveau, font partie de la vie, et questionnent le sens.
Ce texte est beau et juste. Il est simple aussi, ce qui n’empêche pas qu’il hérite d’une tradition. Il joue par exemple sur la figure de l’adynaton. Il dit qu’il est impossible de dire une peine, qu’elle est inconsolable – mais il la dit tout de même, et ce faisant il la console.
Le salut est donc dans l’écriture : Nul chagrin que la plume ne console (4e strophe). J’ai pensé à Du Bellay : En chantant mes malheurs souvent je les enchante. Mais cette vertu cathartique est ici très prudemment formulée. Et la résilience finale est espérée seulement, et non pas certaine.
Poésies
2e prix : Tsunami.
C’est l’évocation fort juste d’un coup de foudre. Il y a une très bonne auscultation de ce moment, où la réalité est bousculée. J’ai pensé à Nathalie Sarraute, géologue des mouvements intérieurs, des tropismes secrets. J'ai noté une lucidité très féminine : Un feu consume le ventre. La fin résume l’ensemble de façon très parlante et progressive : Son âme liée à la nôtre : L’autre, Nous, la Passion. C’est le passage de l’altérité à la fusion, et le triomphe d’éros.
Excellence des formules, bonheurs d’écriture, tout cela peut nous faire oublier qu’un autre type d’amour est possible, basé non pas sur le désir (éros), mais sur le choix volontaire (agapè). Mais dans son ordre, ce texte est irréfutable.
Poésies
3e prix ex aequo : Mon ami est parti.
Ce texte témoigne d’une bonne sensibilité. Il « sonne juste », ce qui veut dire qu’il n’est pas fabriqué ou écrit « de chic », comme dans le cas par exemple du kitsch. Il est authentique, il n’est pas artificiel.
On ne saura par grand chose de celui qui est parti, et c’est tant mieux. S’agit-il d’un copain d’enfance, d’une relation d’amitié plus mûre comme celle de Montaigne ou de La Boétie, ou bien d’un partenaire amoureux, ou encore d’un mixte de toutes ces situations ? L’important n’est pas là. Seul compte son départ : le mot mort ne figure jamais dans ce texte, qui pratique l’euphémisme comme marque suprême de pudeur.
Je retiens l’admirable mot de la dernière strophe : En fermant les yeux pour mieux te voir. C’est très juste et vrai, et clôt ce beau poème sur l’amour et la disparition de l’être aimé. Il n’est plus là et pourtant ce n’est pas le silence : il n’est pas dans sa mort.
Poésies
3e prix ex aequo : L’amour et moi.
Ce poème a choisi la voie du laconisme, et la dernière strophe ressemble à un haïku : Les mots s’enfuient, le souffle s’apaise, le corps se tait. Et ce parti-pris esthétique est très fécond. Moins en effet donne plus bien souvent. Comme dit Phèdre chez Racine : Que ces vains ornements, que ces voiles me pèsent... Débarrassé de ces ornements inutiles que sont les qualifiants, les noms et verbes brillent de tout leur poids originel, définitionnel, archétypal.
Outre cela ce texte aussi donne de l’amour une image peu fréquente : ce qui le suit quand il est comblé, pleinement satisfait. Je ne dirai pas le désamour, mais une sorte de lassitude, d’épuisement. C’est ce que signifie le passage des espoirs aux soupirs (1e strophe).
Du point de vue masculin cela rencontre beaucoup d’échos. Omne animal post coïtum triste – Tout animal est triste après le coït. Ou encore, chez Lucrèce : Surgit amari aliquid, quod in ipsis floribus angat... – Surgit quelque chose d’amer qui au milieu des fleurs (de l’amour) nous prend à la gorge ...
Nouvelles
1e prix : Errance mortelle.
Très beau texte, bien en prise sur l’actualité (la guerre en Ukraine) mais aussi intemporel avec une belle intertextualité (rappel de l’histoire et du mythe d’Antigone). C’est ce mélange qui constitue la réussite.
L’invention ici est double : au sens ancien (latin invenire) c’est une trouvaille, et effectivement le sort de l’héroïne ne diffère pas du mythe antique. Mais l’invention au sens moderne (ajouter du nouveau) réside, outre la mention du quartier Antigone à Montpellier (lui-même Anti-polygone), dans le traitement particulier des personnages : Antigone elle-même, Ismène sœur d’Antigone, Hémon son fiancé, et Créon son oncle. Ils sont présentés comme corrompu (le dernier), extravertis et superficiels (les autres). Bref le traitement du mythe, traditionnel à la fois et novateur, rappelle la familiarité respectueuse de Giraudoux et d’Anouilh.
Le style évolue entre la sécheresse objective et l’émotion lyrique, le narrateur s’adressant directement à Lichenka-Antigone, morte avant le temps : vie fauchée dans sa fleur, avec une grande impression de gaspillage. En écho à la version de Sophocle : Sans l’époux, sans l’hymen que j’aurais dû connaître...
Bravo !
Nouvelles
2e prix : Âmes vagabondes.
Cette nouvelle fait preuve d’une imagination très fertile. La philosophie et la peinture y sont convoquées. Le tableau Les Parques est intériorisé par la narratrice, au point de constituer son histoire. Elle devient Juge de l’application des peines. Sûre d’elle, elle tranche les cas qui lui sont confiés. Mais une rencontre avec un prisonnier, dont elle tombe amoureuse, la fait revenir au début de son histoire, où elle était dans le doute. La boucle se referme.
La construction en trois actes est habile, et surprend agréablement le lecteur. De réels dons de narration. Doit continuer.
© Michel Théron
22/06/23
Le premier prix section poésies
"Un jour peut-être"
A découvrir, pavé bleu de droite ,rubrique "A Lire ..." P45
Le deuxième prix section poésies
"Tsunami"
A découvrir, pavé bleu de droite, rubrique "A Lire ..." P46
Le troisième prix section poésies
"Mon ami est parti"
A découvrir, pavé bleu de droite, rubrique "A Lire ..." P47
Le troisième prix ex aequo section poésies
A découvrir, pavé bleu de droite, rubrique "A Lire ..." P48
Le premier prix section nouvelles
"Errance mortelle"
A découvrir, pavé bleu de droite, rubrique "A Lire ..." N35
Le deuxième prix section nouvelles
"Ames vagabondes"
A découvrir, pavé bleu de droite,rubrique "A Lire ..." N36